Projet de loi 46: pourquoi c'est toujours la police qui enquête sur la police?

Mémoire du Collectif Opposé à la Brutalité Policière (COBP) déposé à la Commission des institutions

1) Qui nous sommes?

Le Collectif Opposé à la Brutalité Policière (COBP) est un groupe autonome qui regroupe des personnes victimes, témoins et/ou concernés par la brutalité policière et tout abus perpétré par la police. Le collectif a vu le jour en 1995, par un comité de défense pour les personnes arrêtées suite à une manifestation contre Human Life International, un groupe d’extrême droite. Face à l’ampleur de la répression, du nettoyage social et de l’impunité toujours croissante sévissant à Montréal, le COBP a décidé de s’organiser sur une base permanente pour continuer sa lutte contre la brutalité policière.
Le COBP a pour but non seulement de dénoncer les harcèlements, violences, intimidation, arrestations et abus de pouvoirs policiers et d’informer les gens sur leurs droits face à la police, mais aussi de soutenir les victimes en les aidant par exemple à porter plainte en déontologie et à faire face à des accusations abusives.
Nous dénonçons les abus policiers ici à Montréal et d’un peu partout dans le monde dans notre journal « L’Agent Provocateur ». Nous avons aussi publié plusieurs brochures notamment sur la police de quartier, la police secrète et l’espionnage politique, et sur « La vaste escroquerie de l’anti-terrorisme canadien ». Depuis 1998, nous avons diffusé plus de 35 000 copies en français, anglais et espagnol du livret « Surprise! On a des droits?! », entre autres à la demande de groupes communautaires qui travaillent avec des gens de la rue un peu partout à Montréal et ailleurs au Québec. Nous faisons également de la recherche, des archives et des banques de données.
Le COBP fait régulièrement des ateliers d’information et de discussion sur les droits et les abus policiers, disponible sur demande. Nous faisons aussi du Copwatch, documentant les agissements de la police dans les rues à l’aide d’une caméra vidéo, appareils photo, en prenant en note les noms des policiers, matricules, numéros d’auto-patrouille, ce qu’ils ont dit et fait, etc.
Nous organisons des spectacles bénéfices et des conférences.  Nous vendons pour nous financer des T-shirts, macarons, patches et « Compiles Anti-Flic ». Nous avons un site internet sur lequel nous publions et archivons de l’information sur les abus policiers et sur nos droits et sur les activités du COBP : http://cobp.resist.ca/

2) Contexte de ce mémoire et histoire d'une lutte contre les bavures et l'impunité

Depuis se création, le COBP se préoccupe des bavures policières et de l'impunité dont bénéficient les policiers qui tuent des gens. La même année de la fondation du COBP, en 1995, l'agent Michel Garneau de la police de Montréal tirait une balle en pleine tête de Martin Suazo, un jeune latino âgé de 23 ans qui était alors détenu, menotté et encerclé par des policiers sur la rue St-Laurent et dont le seul crime était d'être suspect d'un vol de bermudas. La version policière était contredite par le témoignage de témoins civils.

En 1996, le COBP participa aux travaux de la Commission Poitras sur les enquêtes au sein de la Sûreté du Québec, en présentant un mémoire sur 20 cas de morts d'hommes aux mains de la police de Montréal qui analysait les enquêtes sur ces morts intitulé « D'Anthony Griffin à Richard Whaley : vingt enquêtes sur des décès de citoyens lors d'interventions de membres du SPCUM ». Ce mémoire faisait ressortir 12 déviances systémiques dans les enquêtes de la police sur la police : 1) Des policiers de la police de Montréal font une enquête parallèle à celle de la SQ sur les cas de morts d'hommes afin d'accumuler de l'information pouvant servir à orienter les versions policières; 2) Le non respect des règles de l'art de la préservation des scènes de crimes, sous prétexte que ces morts, parce que survenues lors d'opérations policières légitimes, ne constituent pas a priori une scène de crime; 3) L'octroi de délais dans les processus d'enquête afin de permettre aux policiers impliqués de se consulter pour ajuster leurs versions après avoir reçu de l'information sur les versions de témoins civils et de données sur la scène de l'événement; 4) La radiation de certains témoins dans le but d'éviter des témoignages compromettants; 5) La fabrication ou la destruction de preuves; 6) La manipulation du processus judiciaire en exploitant les relations de solidarité existant entre les différents intervenants de l'appareil judiciaire : policiers, procureurs, coroners; 7) La rétention stratégique de certaines informations tandis que d'autres, favorables aux policiers, sont divulguées dans les médias par les corps policiers; 8) Des déclarations officielles, avant la fin de l'enquête, offrant des « conclusions » non fondées au moment où elles sont faites; 9) Des campagnes intensives de relations publiques orchestrées afin de contrer l'image négative véhiculée durant la crise; 10) Des campagnes visant à discréditer les personnes ou groupes qui critiquent publiquement la police lors de ces événements; 11) Le refus systématique des corps policiers de reconnaître leurs torts, d'exprimer des regrets et de formuler des excuses; 12) Le manque de préoccupation des autorités envers les victimes secondaires de ces incidents : parents et amis. Rappelons que la Commission Poitras avait entre autres recommandé : « La situation exige une réelle prise en charge de toute la dynamique provinciale par le ministère de la Sécurité publique. Cette prise de position du ministère de la Sécurité publique devra prendre en considération certaines des inquiétudes que soulève le mémoire qu'a déposé devant nous le COBP ». Plus de 15 années plus tard, on voit que les 12 déviances systémiques peuvent s'appliquer autant à l'affaire Bennis qu'à l'affaire Villanueva, et que le problème reconnu par la Commission Poitras demeure entier.

Par la suite, le COBP s'est particulièrement intéressé au cas de Jean-Pierre Lizotte, un sans-abri décédé après avoir été battu par l'agent Giovanni Stante de la police de Montréal après qu'il aurait commis des gestes indécents sur une terrasse aussi sur la rue St-Laurent. L'affaire Lizotte est révélatrice d'un grave problème qui marque les cas de morts d'hommes aux mains de la police: les autorités ont caché durant plus de 50 jours au public le fait que Lizotte était hospitalisé et qu'il est par la suite décédé. Ce n'est que grâce au témoignage d'un citoyen, publié dans Le Devoir, et à une question posée par le député municipal Marcel Sévigny que l'affaire Lizotte a éclaté au grand jour. Suite à un rare procès, l'agent Stante a été acquitté, ce qui n'empêche pas que Jean-Pierre Lizotte ne serait pas mort s'il n'avait pas été battu à coups de poings par l'agent Stante alors qu'il était déjà maîtrisé par le portier du Shed Café.

Le COBP a aussi organisé une manifestation en 2000 suite à deux décès de citoyens en deux jours dus ai poivre de cayenne (qui venaient s'ajouter à deux autres décès semblables en 1996 à Montréal). Or, le chef pathologiste avait déclaré avant même la fin de son enquête que le poivre de cayenne était une alternative sécuritaire à l'usage de la force mortelle...

Suite au décès de Mohamed Anas Bennis sous les balles de l'agent Yannick Bernier à Côte-des-Neiges le matin du 1er décembre 2005 dans des circonstances qui demeurent mystérieuses à ce jour, le COBP s'est de nouveau intéressé de près à la question des bavures policières et de l'impunité. En particulier, la famille Bennis a vu ses demandes de savoir la vérité se heurter au mur du silence policier et celui du ministère de la Sécurité publique.

En mai 2007, le COBP a publié un texte intitulé « D'Anthony Griffin à Mohamed Anas Bennis : enquête sur 40 personnes tuées en 20 ans par la police de Montréal (1987-2006) ». Ce texte mettait à jour le mémoire du COBP présenté à la Commission Poitras, 10 ans plus tard. Signe que les policiers ne veulent pas reconnaître qu'il y a un problème avec leur usage de la force mortelle, la Fraternité des Policiers et Policières de Montréal tenta de censurer ce document en envoyant une mise en demeure au groupe qui hébergeait le site internet CMAQ (Centre des Médias Alternatifs du Québec) sur lequel le texte avait été publié, sous prétexte que ce texte était « diffamatoire ». Heureusement, ce texte est toujours disponible sur le site du COBP et ailleurs sur l'internet, mais ce geste du syndicat des policiers n'est qu'une preuve de plus que les policiers ne veulent pas qu'on parle publiquement de leurs abus.

En 2008, le COBP s'est joint au mouvement populaire qui s'est soulevé à Montréal-Nord et ailleurs suite au décès du jeune Fredy Villanueva sous les balles de l'agent Jean-Loup Lapointe. Suite aux décès récents de Mario Hamel, Patrick Limoges, Farshad Mohammadi et Jean-François Nadreau, le COBP est toujours présente et impliqué dans la lutte pour mettre fin aux bavures policières et à l'impunité.

3) Pourquoi il faut mettre fin aux enquêtes de la police sur la police

Outre les déviances systémiques énumérées ci-dessus, il est clair que les gens, s'ils y ont déjà cru, ne font plus confiance aux enquêtes de la police sur la police. Trois éléments sont à la base de l'impunité dont bénéficient les policiers quand ils sont impliqués dans des incidents où des citoyens perdent la vie ou sont grièvement blessés : 1) la loi du silence dans la police (si un policier dénonce un collègue, il sera ostracisé et déclaré « persona non grata » au sein du corps policier); 2) le manque de volonté politique des autorités qui ne veulent pas se mettre les syndicats policiers à dos et donc refusent donc d'appliquer les recommandations des nombreuses commissions d'enquête sur la police; 3) le fait que pour trouver des coupables, il faut des preuves, or ces preuves sont recueillies par des policiers...

Ajoutons à cela les aveux de l'ex-enquêteur de la SQ Gaëtan Rivest, qui a déclaré en mai 1996 qu'il avait trafiqué des enquêtes sur des cas de morts d'hommes aux mains de la police afin d'éviter à ses collègues d'avoir à faire face à la justice, notamment dans l'affaire Yvon Lafrance, un homme abattu par l'agent Dominic Chartier en 1989. Rivest a déclaré qu'il aidait les policiers à répondre les bonnes choses pour éviter des poursuites et que cette façon de faire était courante dans les cas de morts d'hommes aux mains de la police. Notons d'ailleurs que l'agent Chartier était le collègue de l'agent Garneau quand celui-ci a tué Martin Suazo en 1995 et qu'il était moniteur de tir pour le SPVM en 2004!

Peu importe si l'enquête est menée par le même corps de police ou un autre, la solidarité policière transcende la couleur de l'uniforme (vert pour la SQ, bleu pour le SPVM...). En effet, comme l'a candidement déclaré l'enquêteur Bruno Duchesne de la SQ lors de l'enquête publique sur la mort de Fredy Villanueva (dont on attend toujours le rapport) : « Nous, les policiers, on est honnêtes ». Avec un tel parti pris, comment peut-on encore appeler les enquêtes de la police sur la police des « enquêtes indépendantes »?

Dans un autre incident moins tragique mais tout aussi révélateur du parti pris des policiers pour eux-mêmes au cours duquel une jeune fille a été poussée sur un parcomètre par un police, le tout étant filmé et sur l'internet, l'inspecteur-chef du SPVM Patrick Lalonde affirme : « Une image, c'est bien maudit. Une image peut être trompeuse. Des gens chez nous sont à analyser tout ça, mais j'ai peine à croire que c'était prémédité, qu'on a vraiment dirigé la personne vers le poteau». Ainsi, avant même que l'enquête interne du SPVM ne soit terminée, l'inspecteur-chef Lalonde nous livre le fonds de sa pensée comme quoi le policier impliqué doit être innocent!

On voit avec ces exemples que les policiers ne peuvent aucunement être neutres quand il s'agit d'enquêter sur leurs collègues, peu importe de quel corps de police qu'ils soient. Plus souvent qu'autrement, ils considèrent leurs collègues comme des victimes et leurs victimes comme des agresseurs. Ce qui veut dire qu'il faut mettre fin aux enquêtes de la police sur la police si on veut rétablir un minimum de crédibilité aux enquêtes sur les cas de morts d'hommes aux mains de la police.

4) Le négationnisme des autorités face aux abus policiers et à l'impunité

Le problème fondamental avec les enquêtes de la police sur la police, ce n'est pas que la perception d'injustice qu'elles projettent, contrairement à ce qu'en dit le ministre de la Sécurité publique Robert Dutil. Le problème à la base, c'est que les policiers, leurs syndicats et les autorités ne reconnaissent jamais qu'il y a un problème d'abus de pouvoir, de bavures policières et d'impunité au Québec. Or, si on nie le problème, on est loin de trouver des solutions pour le régler.

Nous avons mentionné tantôt le fait que les autorités ont caché au public durant plus de 50 jours le décès de Jean-Pierre Lizotte suite à son tabassage par un agent du SPVM. La Ville de Montréal a par ailleurs aussi soutenu les démarches de la Fraternité des Policiers et Policières de Montréal qui est allé jusqu'en Cour Suprême du Canada pour tenter de faire annuler les enquêtes publiques du coroner sur la mort de Michel Berniquez et de Mohamed Anas Bennis. Si on ajoute à cela la tentative de censure du texte du COBP sur « 40 personnes tuées par le SPVM en 20 ans », on voit que les autorités et la police sont prêts à tout pour éviter que les critiques de leurs interventions qui finissent très mal se retrouvent sur la place publique.

Le ministre de la Sécurité publique du Québec n'échappe pas à ce problème de la négation de abus policiers et de leur impunité. En déposant son projet de loi 46 sur le soi-disant « Bureau civil de surveillance des enquêtes », le ministre Dutil reconnaît qu'il y a un grave problème avec les enquêtes de la police sur la police dans les cas de blessures graves ou de morts d'hommes aux mains de la police. Pourtant, au lieu de remédier au problème, le ministre ne fait que tenter de sauvegarder l'ancien système d'enquêtes de la police sur la police en y ajoutant un bureau bidon sans pouvoir dont le seul but est de tenter de donner de la légitimité aux enquêtes de la police sur la police! Notons que les policiers s'opposaient bien entendu à toute réforme, arguant que le système actuel leur allait très bien. C'est normal quand on sait que les accusations portées contre des policiers impliqués dans des cas de blessures graves ou de morts d'hommes sont rarissimes (4 cas sur plus de 60 morts à Montréal en 1987 et 2012; 3 cas sur plus de 300 blessés et morts au Québec depuis 1999; l'affaire Lizotte est comptée dans ces deux catégories). Les enquêtes de la police sur la police s'apparentent plus à un cover-up visant à blanchir les policiers impliqués qu'à une véritable enquête visant à établir les faits et à récolter des preuves contre un éventuel criminel.

Ajoutons à cela le secret entourant les enquêtes et les décisions du Directeur des Poursuites Criminelles et Pénales (presque systématiquement la décision de ne pas porter d'accusation contre les policiers), et on comprend pourquoi les familles de victimes de la police réclament la justice et la vérité, de même qu'on comprend pourquoi la majorité de la population ne fait aucunement confiance au système actuel d'enquêtes de la police sur la police auquel le projet de loi 46 ne changerait absolument rien dans les faits.

5) Le problème fondamental : les abus policiers et leur impunité

C'est bien beau de vouloir s'attaquer aux enquêtes de la police sur la police, mais il faudrait si on veut vraiment arrêter ou au moins limiter les cas de morts d'homme aux mains de la police s'en prendre aux techniques policières meurtrières qui sont à la base du problème. Et il ne faut pas oublier que les cas de morts ou de blessures graves ne sont que la pointe de l'iceberg des abus quotidiens perpétrés par des policiers un peu partout, qu'on parle de harcèlement, d'insultes, de menaces, de coups et d'arrestations abusives, de profiage racial, social et politique.

Ces abus restent le plus souvent dans le silence parce que les gens ont peur de dénoncer et de porter plainte, ou encore parce qu'ils se disent que ça ne sert à rien de porter plainte car le système protège les policiers. Et quand on regarde les chiffres de la déontologie policière, on ne peut que leur donner raison malheureusement. La plupart des plaintes sont envoyées en conciliation, un processus dans lequel les personnes qui se sentent lésées doivent rencontrer les policiers qui les ont abusé, pour ensuite signer un papier selon lequel ils retirent leur plainte! On dirait donc que la déontologie policière protège plus les policiers que les citoyens. Et comme les enquêteurs policiers qui enquêtent sur leurs collègues dans les cas de bavures policières, la quasi totalité des enquêteurs de la déontologie policière à Montréal sont des ex-policiers et on s'imagine que la situation est la même à Québec. Donc, même à la déontologie policière, ce sont des (ex-)policiers qui enquêtent sur des policiers, ce qui explique peut-être le très faible taux de plaintes qui donnent lieu à des enquêtes et à des sanctions pour les policiers.

Pour illustrer l'ampleur du problème, le cas de l'agent Pascal Daze parle de lui-même. L'agent Daze a été filmé en train de dire qu'il aimait la déontologie policière car il faisait beaucoup d'argent en heures supplémentaires grâce à elle. Puis il ajouta que la déontologie policière ne protège aucunement les citoyens contre les abus des policiers. Une plainte en déontologie a été déposée contre l'agent Daze pour ses propos qui ridiculisent complètement la déontologie policière. Or, cette plainte a été rejetée sous prétexte que les propos de l'agent Daze n'étaient pas assez marqués pour constituer un manquement au Code de déontologie policière! Comme quoi, un policier peut se moquer publiquement de la déontologie policière et il ne sera pas puni par celle-ci.

Quel message est-ce que cela envoie aux citoyens et aux autres policiers? Que les policiers sont au-dessus des lois et qu'ils peuvent dire et faire ce qu'ils veulent sans subir aucune conséquence.

6) Recommandations pour mettre fin aux abus, aux bavures et à l'impunité

Selon nous, il ne suffit pas de mettre fin aux enquêtes de la police sur la police pour régler le grave problème qui existe entre la police et les citoyens. D'ailleurs, à ce niveau le projet de loi 46 ne fait qu'empirer la situation en démontrant que le gouvernement nie toujours le fait que les policiers ne peuvent enquêter sur leurs pairs de manière impartiale et qu'il préfère tenter de manipules les gens avec un semblant de réforme qui ne change rien au final. Ce n'est pas qu'une perception d'injustice le problème, le problème fondamental c'est l'absence de justice quand les policiers abusent de leur pouvoir, brutalisent et tuent des gens.

C'est pourquoi nous recommandons de rejeter complètement le projet de loi 46. Nous sommes signataires de la Déclaration de la Ligue des Droits et Libertés qui exprime clairement les critères que l'on juge acceptables pour des enquêtes sur des cas de bavures policières. Le projet de loi 46 n'en satisfait aucun.

Afin d'éviter d'avoir à déclencher des enquêtes sur des bavures, nous recommandons également au gouvernement de mettre fin aux pratiques policières meurtrières enseignées à l'Institut de police de Nicolet comme l'usage des armes à feu (en particulier contre des personnes en crise), l'usage de poivre de cayenne (une arme soi-disant non-létale qui a déjà causé 4 morts à Montréal), l'usage de Tasers (un outil de torture qui n'est pas une alternative aux armes à feu mais juste un outil de plus dans l'arsenal policier et qui a déjà causé plus de 700 morts en Amérique du Nord dont Quilem Registre à Montréal et Claudio Castagnetta à Québec), les poursuites policières en automobile, l'usage de balles de plastique (qui ont fait perdre la voix à un manifestant lors des manifestations contre le Sommet des Amériques à Québec en 2001 et qui ont été impliquées dans la mort de Philippe Ferraro à Montréal en 1995), l'usage de grenades assourdissantes (qui ont fait perdre un œil à Francis Grenier, un étudiant qui manifestait contre la hausse des frais de scolarité à Montréal le 7 mars 2012) et l'usage de gaz lacrymogènes (dont le tir à l'horizontale avait blessé à l’œil un manifestant devant le Parlement à Québec il y a quelques années).

Nous recommandons également au gouvernement de réformer de fond en comble la déontologie policière afin que ses enquêteurs ne soient plus des anciens policiers et de lui donner des dents afin qu'elle serve à autre chose qu'à blanchir les policiers et à faire perdre leur temps aux citoyens avec la conciliation. On ne veut pas de conciliation avec les policiers, on veut qu'ils aient des sanctions!

Nous recommandons de mettre fin totalement et immédiatement aux enquêtes de la police sur la police. Il faudrait que ces enquêtes sur les cas de blessures ou de morts aux mains de la police soient confiées entièrement à des civils. De plus, il faudrait que les familles de victimes, des membres de la communauté et des militantEs pour les droits de la personne puissent y jouer un rôle et avoir accès aux preuves dans le cadre de ces enquêtes.

Nous recommandons d'accuser les policiers quand ils sont coupables de négligence ou de meurtre au lieu de les blanchir systématiquement comme le fait le système actuel.

Nous recommandons au gouvernement et aux autorités municipales d'abolir tous les règlements municipaux arbitraires et désuets qui donnent aux policiers des pouvoirs d'intervenir auprès de populations cibles (itinérants, jeunes dans les parcs, etc.) ce qui entraîne des situations qui peuvent dégénérer comme l'a illustré de façon tragique la mort de Fredy Villanueva et le fait que deux de ses amis ont également été blessés tout cela sous prétexte qu'il est interdit de jouer aux dés dans les parcs!

Finalement, nous recommandons au gouvernement de réduire les inégalités sociales et d'augmenter les services sociaux et de santé, plutôt que d'augmenter le nombre de policiers dans nos communautés, ce qui ne fait qu'accroître les tensions plutôt que d'aider les gens qui en ont besoin. Même les syndicats de policiers reconnaissent que les policiers ne devraient pas avoir à intervenir auprès de personnes en crise car ils ne sont pas formés pour cela. Il est grand temps que le gouvernement prenne ses responsabilités et intervienne pour mettre fin aux profilages, aux abus policiers, aux bavures et à l'impunité dont bénéficient les policiers.

Les milliers de personnes qui ont déferlé dans les rues de Montréal le 15 mars dernier à l'occasion de la 16ième Journée Internationale Contre la Brutalité Policière avaient un message clair qui a été éclipsé par les gaz et les grenades assourdissantes lancées par le SPVM : il ne peut pas y avoir de véritable paix sans justice. Les gens sont tannés des abus policiers et du fait qu'ils ne sont jamais punis. Abolir définitivement les enquêtes de la police sur la police ne serait qu'un premier pas, mais ça serait déjà un message aux policiers qu'ils ne sont plus complètement au-dessus des lois et à l'abri de toute critique du public. L'inaction du gouvernement est complice des abus perpétrés par les policiers et de leur impunité. À chaque mort de plus, c'en est un de plus sur la conscience des politiciens qui ne font rien pour que cessent les bavures policières. La révolte populaire face à ces injustices est légitime. Combien de morts va-t-il falloir y avoir pour que le système nous donne l'heure juste?

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