SPVM: une nouvelle politique décevante

La nouvelle politique visant à réduire les risques de profilage racial dans les interpellations faites par les policiers montréalais est jugée décevante par plusieurs groupes sociaux et élus municipaux.

• À lire aussi: La STM reconnaît l'existence du racisme systémique

• À lire aussi: Adolescente arrêtée: une mère interpelle le directeur du SPVM

Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a dévoilé mercredi sa nouvelle politique, fort attendue depuis le dépôt l'an dernier d'un rapport qui démontrait que les minorités visibles sont plus susceptibles de se faire interpeller par les policiers.

À compter de l'automne prochain, les policiers devront remplir des fiches d'interpellation informatisées expliquant le contexte de leurs interventions, incluant les faits observables menant à celles-ci, et «l'identité ethnoculturelle» de la personne interceptée (il ne s'agit que d'un changement de vocabulaire : auparavant, la «race» devait être indiquée).

Une telle fiche ne doit être remplie que lorsque le policier juge que l'interpellation est en lien avec la mission du SPVM, ce qui laisse une marge de manoeuvre aux agents, déplorent certains.

Toute interpellation sans fondement, aléatoire ou basée sur un critère discriminatoire est explicitement interdite.

Les membres du personnel ne respectant pas la politique «seront pris en charge», a indiqué Sylvain Caron, directeur du SPVM.

«Ça a peu répondu à nos attentes», a regretté Alexandra Pierre, présidente de la Ligue des droits et libertés. Selon elle, la politique reste floue et «laisse encore beaucoup de place à l'interprétation des policiers».

Même son de cloche du côté du Centre de recherche-action sur les relations raciales (CRARR), qui estime que la politique n'engendrera pas de changements significatifs comme auraient pu le faire, par exemple, des caméras portatives.

«On est très déçus», a aussi mentionné Lionel Perez, chef du parti municipal d'opposition Ensemble Montréal.

«Pour atteindre ses objectifs, une politique d'interpellation se doit d'être contraignante. Celle-ci ne l'est pas», a dit celui qui croit qu'elle laisse trop de pouvoir discrétionnaire aux policiers et ne spécifie pas les sanctions.

Le SPVM a dit qu'il ne s'attendait pas à une baisse des interpellations avec cette nouvelle politique. Selon M. Perez, il s'agit d'un non-sens, car elle est censée éliminer les interpellations discriminatoires.

Une autre critique récurrente est que la politique ne concerne pas les conducteurs, mais plutôt les piétons. Les policiers peuvent demander des pièces d'identification aux conducteurs même sans infraction au Code de la sécurité routière.

Cela ne permettra pas de s'attaquer à la problématique du «driving while black», a déploré M. Perez. Cette expression fait référence aux conducteurs interceptés parce qu'ils sont Noirs.

En n'appliquant pas la politique aux conducteurs, «on manque à peu près 80 % de la réalité sur le terrain», a soutenu Alain Babineau, conseiller du CRARR et ancien officier de la GRC.

La politique sur les interpellations est «une bonne première étape», selon la responsable de la sécurité publique au comité exécutif de la Ville, Rosannie Filato. «C'est une première mouture d'une politique qui doit évoluer et on veut absolument entendre les citoyens», a-t-elle mentionné.

La politique pourra être mise à jour en 2021 si nécessaire, selon le SPVM.

- Une interpellation est définie comme une «interaction entre un policier et une personne au cours de laquelle le policier tente de l'identifier et de collecter des informations».

- Elle peut servir à assister une personne dans le besoin, à prévenir des incivilités ou un crime, à identifier une personne recherchée ou à recueillir des informations.

- Le policier doit informer le citoyen du motif de l'interpellation. Ce dernier n'est pas obligé de s'identifier ou de répondre aux questions et peut quitter les lieux car il n'est pas détenu.

Catégories

Corp policier (SPVM, SQ, GRC, agent de la STM, etc): 

Ville où l'événement s'est produit: 

Type de document: