UQAM: des photojournalistes rudoyés par des militants grévistes

L'UQAM a de nouveau été le théâtre de dérapages, mercredi, lorsque des médias ont été pris à partie par des militants lors d'un commando visant à orchestrer une levée de cours en après-midi. Un photographe de l'agence QMI a été brutalisé et son appareil a été fracassé.

Maxime Deland a déposé une plainte au Service de police de la Ville de Montréal. « Je me suis retrouvé encerclé et je sentais qu'on tentait d'empoigner mon appareil. C'est la première fois que le climat était aussi hostile. La tension était vraiment dans le tapis », raconte le photographe.

Les événements se sont produits dans un corridor étroit situé devant une salle de cours du pavillon J.-A.-DeSève.

Une vingtaine de militants masqués se sont présentés dans l'espoir d'interrompre le cours, où se trouvait une cinquantaine d'étudiants.

Plusieurs agents de sécurité étaient présents, sur le qui-vive.

Environ 10 000 étudiants de l'UQAM ont voté pour une grève illimitée, dont les 5000 membres de l'Association facultaire étudiante des sciences humaines (l'AFESH). Une injonction en vigueur jusqu'en juillet vise toutefois à permettre l'accès aux cours donnés par l'université.

« Laissez-les sortir ! Laissez-les sortir ! », scandaient les militants masqués, au sujet des étudiants de la classe. Les agents de sécurité formaient une haie pour escorter ceux qui souhaitaient quitter la salle de cours.

D'autres étudiants ont décidé de rester à l'intérieur de la classe. Des agents de sécurité gardaient la porte et avaient reçu la consigne de repousser les militants dans le corridor.

C'est à ce moment que les choses se sont envenimées.

Selon le photographe de La Presse Patrick Sanfaçon, également la cible des militants, ils ont d'abord tenté de voiler leurs appareils avec des parapluies, des cartons ou leurs mains. Certains ont ensuite tenté de s'emparer de leurs appareils photo, en plus de les bousculer.

Maxime Deland a bien tenté de protéger son matériel et son collègue, sans succès. « Un des jeunes s'est emparé de la ganse de mon appareil et s'est mis à tirer à deux mains comme dans un jeu de souque à la corde. Après avoir pris l'appareil, il a fait comme un joueur de football qui a réussi un touché », raconte Maxime Deland.

Résultat : l'appareil s'est fracassé sur le sol. Dans l'échauffourée, le photographe a également été coupé au visage.

Les policiers dépêchés sur place n'étaient pas les bienvenus. « Pas de police dans nos écoles ! », répétaient les militants.

Ceux qui étaient masqués ont alors déguerpi, abandonnant leurs vêtements dans une cage d'escalier.

De retour devant la porte du local ciblé, une militante tentait de faire entendre raison à un agent de sécurité qui bloquait l'entrée. « Nous sommes en grève ! Il faut respecter la démocratie et la voie de la majorité ! », lançait-elle.

La Fédération professionnelle des journalistes du Québec a condamné le comportement des militants. « On a recensé une dizaine de cas depuis mars. Personne ne devrait rester insensible devant la violence, et envers n'importe qui », explique la présidente Lise Millette, qui se dit très préoccupée par la suite des choses. « Le journaliste est un témoin. Il ne prend pas part au conflit. Et même si on est contre les journalistes, s'en prendre à eux n'est pas une façon d'exprimer son mécontentement », ajoute Mme Millette.

Cette journée houleuse s'était pourtant amorcée dans le calme. En matinée, des militants prenaient leur déjeuner tranquillement devant le local de l'AFESH. Vers 9 h 30, quelques militants ont commencé à se rassembler. Une vingtaine d'entre eux ont ensuite fait irruption dans un amphithéâtre bondé où se déroulait un examen de psychologie.

Des étudiants des deux camps ont discuté un bon moment, jusqu'à ce que le professeur demande aux agents de sécurité sur place d'expulser les militants. Une violente escarmouche a éclaté à l'intérieur de la salle et près de la porte. Un des militants éjectés par les agents de sécurité se tordait de douleur, un autre s'est fait confisquer son mégaphone.

Plus loin, quelques militants tambourinaient dans le mur pour perturber l'examen.

L'un d'eux soufflait un peu en retrait, flanqué d'un agent de sécurité au physique impressionnant. Le ton était respectueux. « J'apprécie ton calme et ton sang-froid. Tu fais ta job, je fais la mienne », a déclaré le jeune militant cagoulé. « Tu sais, on n'aime pas ça, faire ça », a répliqué l'agent de sécurité.